le chantier de restauration de la maison de Pierre Loti entre dans sa dernière phase

le chantier de restauration de la maison de Pierre Loti entre dans sa dernière phase

Det moins d’un an, la maison Pierre Loti sera accessible au public. Treize ans après sa fermeture, et cinq années après le lancement d’un gigantesque chantier de restauration de 16 millions d’euros, la maison est encore loin de retrouver son apparence de 1923. Celle « dans son état le plus abouti » qui existait à la mort de Pierre Loti selon le choix élaboré par les professionnels regroupés autour de l’architecte du patrimoine Elsa Ricaud (1).

En pénétrant au rez-de-chaussée, le salon rouge est nu et encore dépourvu des décors bourgeois et meubles caractéristiques de l’univers de la fin du XIXet siècle. Les teintures murales de couleur rouge foncé/grenat n’ont pas été reposées, laissant apparaître pierres de taille, moellons et murs bruts de finition d’une maison charentaise alors que le plafond reste soutenu par des étais.

Le salon bourgeois bleu est encore loin d'avoir retrouvé son éclat.

Le salon bourgeois bleu est encore loin d’avoir retrouvé son éclat.

Jean-Christophe Sounalet / SO

Même sentiment de dépouillement quand on franchit successivement les pièces de cette maison monde : le salon bleu dont les peintures du plafond se sont écaillées. Dans quelques mois, les rideaux – des soieries moirées « imitant l’ondulation à la surface de l’eau et leur donnant un aspect très irrégulier » – d’un gris légèrement bleuté ainsi qu’un lustre à pampilles redonneront son lustre à cet autre salon bourgeois.

Idem pour la salle Renaissance toujours délestée de ses tapisseries du XVIIet siècle. Très abîmées car rongées par les termites, elles ont été réparées à Aubusson. L’escalier monumental sera pourvu de son authentique tapis d’origine, disparu à 95 %. Mais à partir d’un m² conservé en bon état dans les réserves de la Ville, « il a été reconstitué puis retissé sur des métiers anciens à Aubusson », apprécie Elsa Ricaud.

La salle Renaissance reste engorgée par des échafaudages.

La salle Renaissance reste engorgée par des échafaudages.

Jean-Christophe Sounalet / SO

À l’étage, la salle gothique abrite des éléments qui comptent parmi les plus anciens de l’édifice : des boiseries du XVet – XVIet siècle provenant d’une église de la région de Toulouse. Des lambris dévorés par des insectes xylophages tandis que pendant le chantier, les équipes de restauration ont découvert que le plafond en bois était infesté de termites.

Reconstitutions

Maître verrier installé en Gironde, Eric Dupuis a œuvré à « remplacer et nettoyer » les vitraux ornés de blasons et d’armes que Loti s’est inventés et qui sont répartis dans les salles Renaissance et gothique. Parmi les autres facéties de l’écrivain, la récupération de trois fenêtres gothiques de l’église de Marennes. Coupées en deux, elles ont procuré six ouvertures pour la salle gothique.

La mosquée et son plafond aujourd'hui sauvé grâce au soutien du Loto du patrimoine en 2018.

La mosquée et son plafond aujourd’hui sauvé grâce au soutien du Loto du patrimoine en 2018.

Jean-Christophe Sounalet / SO

Un étage encore au-dessus, le plafond de la mosquée provenant de la région d’Alep (Syrie) dont un bout était tombé en 2015, est maintenant bien restauré. Il restera à nettoyer les magnifiques céramiques originaires de Turquie, Algérie, Iran, Maroc. Idem pour le plafond en plâtre du salon turc dont les muqarnas et stalactites sont inspirées du palais de l’Alhambra (Grenade). « Le bas de tente ottoman de plus de quatre mètres de long a pu être sauvé et il est en cours de restauration au musée du Louvre, une possibilité offerte grâce au label Musée de France », indique Elsa Ricaud.

Un détail de boiserie du plafond de la salle gothique.

Un détail de boiserie du plafond de la salle gothique.

Jean-Christophe Sounalet / SO

Parmi les temps forts à attendre lors des futures visites, la vue de la reconstitution de la chambre basque (ou espagnole), en surplomb de la salle gothique. Elle avait été démolie dans les années 1970 et remplacée par un corset de béton.

La chambre basque (ou espagnole) a été reconstituée au-dessus de la salle gothique.

La chambre basque (ou espagnole) a été reconstituée au-dessus de la salle gothique.

Jean-Christophe Sounalet / SO

Autre restitution avec la salle chinoise, détruite à la fin des années 1920 et dont les collections ont été vendues aux enchères à Drouot en 1929. À partir de l’importante documentation qui a subsisté s’est ajoutée l’heureuse découverte de vestiges lorsqu’ un mur a été purgé de ses enduits pour colmater une fuite, laissant entrevoir « empochement des poutres, emplacement des colonnes disparues, feuillures des fenêtres », livre Elsa Ricaud, dont les équipes se sont attelées à une véritable « enquête policière » pour reconstituer des décors aux tons rouges sublimés par une copie en tilleul du trône, réalisée par l’atelier de la Chapelle à Cholet. « Un travail d’un an pour un sculpteur. »

(1) En dehors des murs, les 2 000 objets ont été restaurés sous la surveillance du conservateur de la maison de Pierre Loti, Claude Stéfani.

Rendez-vous en 2025

Le maire Hervé Blanché a dévoilé les deux dates clés de l’année 2025 : l’inauguration aura lieu le 20 mai 2025 (en référence à l’élection de Loti à l’Académie française le 21 mai 1886), le président de la République a été invité.
L’ouverture au public est programmée le 10 juin (date anniversaire de la mort de Loti) : les visites seront uniquement guidées par groupes de dix personnes (jusqu’à 14 groupes quotidiens se succéderont au plus fort de la saison). La fréquentation annuelle est estimée à un peu plus de 30 000 personnes.

Author: Franck Riviere