Sur les vieilles photos, datées des années 1940 et conservées par les habitants, les rues de Miribel sont noires du monde. À l’époque, les voyageurs ne cessent d’affluer dans ce petit village de l’Ain, à quelques kilomètres au nord-est de Lyon. L’objet de leur séjour ? Une majestueuse statue de la Vierge Marie, installée sur hauteur sess. Imaginée par l’abbé Pierre Thomas, son curé à l’époque, et conçue par le sculpteur savoyard Georges Seraz, Notre-Dame-du-Sacré-Cœur dite la Madone du Mas-Rillier, est inaugurée en 1941. Haut-lieu de pèlerinage pendant une décennie, le site fut progressivement déserté et délaissé.
Mais, sous l’impulsion d’une poignée de Miribelans, il se prépare à retrouver une place de choix au sein du patrimoine religieux. La communauté de communes, qui en est désormais propriétaire, vient de valider un chantier important. Les travaux sont évalués à plus de quatre millions d’euros et financés grâce au soutien de l’État et de nombreuses collectivités. Ils visent à sauver la statue des effritements, causés par des infiltrations, et à sécuriser son esplanade, mais surtout à réhabiliter l’ensemble du site, pour attirer un large public. « Son architecture est remarquable, elle nous offre une vue sur sept départements, et quelques centimètres, seulement la séparent du Christ rédempteur de Rio ! (1), s’enthousiasme Josiane Bouvier, élue chargée du patrimoine. C’est un lieu qui peut toucher tout le monde, que l’on soit croyant ou non. »
L’idée d’un curé « débrouillard »
L’histoire naît dans la petite église du hameau du Mas-Rillier, au début des années 1930. Alors que le diocèse vient d’y établir une confrérie de Notre-Dame du Sacré-Cœur, une Vierge à l’Enfant est installée. La petite statue, à laquelle des premiers cas de guérison sont attribués, devient rapidement une foule de pèlerins venus de tout le pays.
Le père Thomas, avec le soutien de Mgr Virgile Joseph Béguin, évêque de Belley, voit alors les choses en grand : ensemble, ils décident de dédier à la Vierge une sculpture, haute de 30 mètres. « Pour récolter des fonds, le curé, particulièrement débrouillard, édite un bulletin, fait graver des médailles et imprimer des cartes pieuses dans toutes les langues », raconte Josiane Bouvier. En 1938, 8 000 personnes assistent ainsi à la pose de la première pierre.
Plus de visites et d’événements
Entourés de magasins d’objets de piété, de lieux de restauration et de grands parkings, la Madone et son carillon – installés à quelques dizaines de mètres – deviennent un véritable site touristique jusqu’à, « faire de l’ombre à Fourvière », raconte un journal de l’époque. Mais à la mort de l’abbé Thomas, en 1952, sa gouvernante, qui hérite de la gestion du site, refuse de la céder au diocèse qui interdit alors les pèlerinages. Le site passera entre les mains de la collectivité en 1977.
L’office de tourisme espère pouvoir multiplier les visites, aujourd’hui limitées à la période estivale, et voir naître de nouveaux événements comme l’actuel festival Swing sous les étoiles, au mois de juillet. « De notre côté, quelques messes sont célébrées dans la petite chapelle, et nous essayons d’y tenir certains rendez-vous, comme ceux des jeunes catéchistes, explique au nom de la paroisse Jean-Claude Jeannin. Il faut saisir cette occasion pour faire revenir des voitures remplies à l’occasion, par exemple, du 15 août ou du 8 septembre ! »
(1) La Madone du Mas-Rillier mesure 32,6 mètres, dont 3 mètres de socle alors que la statue du Christ Rédempteur à Rio de Janeiro (Brésil) culmine à 38 mètres, dont 8 pour le piédestal.